Michel LABLAIS
1925-2017
Michel Lablais nait en 1925 à Paris aux Batignoles, il est le premier enfant et restera l’unique d’un couple de jeunes mariés. Lui, célibataire jusqu’alors, a cinquante et un ans, il est agent commercial , elle,,jeune veuve de quarante deux ans a la douce naïveté de prendre sa grossesse pour un embonpoint passager. Fils de parents « âgés » profondément affectueux et sans à priori sur l’éducation Michel Lablais a déjà tout pour lui :
la naïveté heureuse et la sérénité amusée face aux évènements de la vie. Il fréquente sans enthousiasme l ‘école communale et lui préfère les vacances temps de liberté et de découvertes. Déjà le sable et les coquillages peuplent son univers… On ne le poussera guère à aimer les études, on lui apprendra vite à profiter de l’air du temps sans toutefois se marginaliser totalement.Le bon sens sert à son père de principe d’éducation et lui dicte l’attitude qui lui fait dire un jour à son fils « si tu es premier, je te fiche une paire de claques »… Ce jour là Michel Lablais a tout compris et depuis il enrobe sa vie d’une ironie saine sinon cinglante. Dans le même esprit, quand il a voulu faire de la peinture plutôt que de choisir « un métier sérieux » ses parents se rangèrent à son idée que puisqu’on ce qu’on aimait faire….
Rentré en 1929 au Lycée Chaptal il y est un élève moyen . Plus littéraire que mathématicien, il ne déteste pas cependant les sciences naturelles et la géométrie.
Ce climat d’éducation lui donne un œil amusé sur les êtres et les choses et le dispense de tout enthousiasme ou rejet adolescent. Laconique son père l’impressionne mais lui apprend la logique des raccourcis et l’humour mordant et froid qu’on pourrait dire anglais. Il reconnaît à sa mère une intuition perspicace et un sens du quotidien souriant. C’est pourquoi il aime jouer et se jouer de tout au point de donner l’impression d ‘avoir trouvé en cela l’essentielle règle de sa philosophie.
En 1942, il est élève aux Arts Appliqués de Paris mais rêve plus aux voyages qu’aux projets d’école. Avec insouciance et toujours ce refus d’accorder une quelconque densité aux évènements il s’engage alors dans l’armée et part comme cartographe en Indochine. Sa carrière militaire dure peu. De retour en France en 1947, il devient étalagiste et décorateur aux magasins du Printemps.
En 1948, il découvre l’Océanie et prend goût à cette vie d’explorateur qui hésite entre le roman d’aventure et le reportage ethnographique. Il découvre par la suite les Nouvelles Hébrides puis rentre en France en 1953.
Il décide alors de devenir peintre.
Avec Horst Egon Kalinowki, un sculpteur allemand qui travaille à la Grande Chaumière et le musicien Jacques Langlet s’établit alors une complicité autant intellectuelle qu’affective qui perdurera.
Son travail y trouve force et densité et s’oriente du dessin vers la peinture à l’huile conçue comme une technique plus riche et exigeante. Rapidement après une période où les collages prédomineront il reviendra à l’aquarelle plus adaptée à la virtuosité de son dessin et à son univers onirique. Il osera même appliquer cette technique ou il est merveilleusement à l’aise aux très grands formats.
Le climat amical et intellectuel ou gravite alors Michel Lablais est fortement marqué par la rencontre qu’il fait en 1956 de Daniel Cordier. L’ancien secrétaire de Jean Moulin s’essaie alors à la peinture, mais, lucide, il préfèrera très vite exprimer l’art des autre en devenant le marchand et le collectionneur éminent qui reste le découvreur de Dubuffet, Michaux, Réquichot, Dado, et Bettencourt, de tout un groupe de peintres singuliers, souvent inclassables mais simplement essentiels. La donation Daniel Cordier au centre Georges Pompidou fera entrer deux toiles de Michel Lablais dans les collections publiques.
Dans le sillage de Daniel Cordier, Lablais se crée tout un réseau de relations et admirations. Il rencontre Victor Brauner, Gillioli, Réquichot, Dado, Lunven et Bettencourt. Il voit fréquemment Léonor Fini, Fred Deux, Getty Wols et Iris Clerc. On imagine la communauté d’esprit qu’il rencontre dans cet entourage. Ses amis écrivains se nomment Bernard Noël, Andrée Chédid, Gilles Lipovesky, Michel Dupert et Michel Tournier. Lecteur assidu, Michel Lablais dit aimer l’œuvre de Proust à peine plus que celle de Simenon. Il prend plaisir aux biographies historiques et trouve pertinent chez Saint-Simon ce sens du détail qui décrit le tout.
Une remarque qui pourrait s'appliquer à son propre travail.
L’œuvre de ce peintre collectionnée par de vrais inconditionnels est rare et singulière. Si elle n’en demeure pas moins essentielle est hors des manifestes et des écoles.
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Michel Lablais was born in 1925 in the Batignolles neighborhood of Paris. He was the first born and ultimately only child of recent newlyweds. He was a 51-year-old salesman, bachelor up until then… She was a young widow of 42 whose sweet natural way helped her go through pregnancy as though it was temporary plumpness. Being the son of profoundly loving, « elderly » parents who had no hard set ideas on education, Michel Lablais already had it all. Cheerful, carefree, he was amused by the course of daily life. He attended the local school warily preferring the vacations that allowed for free time and discovery. Seashells and sand were already a part of his world. Michel wouldn’t be particularly encouraged to value his studies. Moreover, he was taught to take advantage of the signs of the times without completely turning his back on the mainstream. Common sense being the main principle of Michel’s father educational guidelines, it lead him to declare to his son one day, « If you’re ever first in your class, I’ll give you a couple of smacks ». On that day things fell into place for Michel and, from then on he wrapped his outlook on life in layers of healthy save scathing irony. In the same vein, when he wanted to paint instead of a profession in the straight and narrow, his parents fell in line with his choice.
In 1929 Michel started classes at Lycée Chaptal where he was an average student. More literary than mathematical, he wasn’t however adverse to the natural sciences and geometry. The consensus reigning about his education gave him an amused eye on people and things while exempting him from adolescent enthusiasm or rejection. A man of few words, his father was intimidating, however he taught Michel the logic of artful summarizing and dry, biting humor usually identified as English. From his mother he received incite and intuition, as well as a insouciant approach to everyday life. That explained his playful manner, making light of everything to the point of giving the impression that it was the nexus of his creed. As a student of the School of Applied Arts in Paris, he dreamt more of traveling than of his school assignments. With his perpetual carefree attitude and refusal to consider events with any intensity, he enlisted in the army as a cartographer who would be stationed in Indochina. His military career was short-lived. Upon his return to France in 1947 he became a window dresser and decorator at the Printemps department store. The following year he visited Oceania for the first time and took to the life of an explorer destined for adventure novels or for ethno-graphic reports. His next territory of discovery was the New Hebrides after which he returned to France in 1953. Michel then decided to devote himself to painting. With Horst Egon Kalinowski a German sculptor working at the Grande Chaumière studio in Montparnasse and the musician Jacques Langlet, Michel formed a lasting bond that was as intellectual as sentimental. In this environment his work grew in force and density, gravitating from drawing to oil painting considered as a richer, more exacting technique. After a period where collage dominated, he rapidly returned to watercolors that was more adapted to his virtuosity and his dreamlike atmosphere. He even applied this technique where he was amazingly in his element to very large formats.
The amicable and intellectual sphere in which Lablais gravitated was strongly affected by his encounter with Daniel Cordier in 1956. The former secretary of Jean Moulin, a leader of the French Resistance, was launched in a career of painting. However being realistic, he rapidly re-oriented himself towards collecting the art of other artists and representing them. Along the way he discovered Dubuffet, Michaux, Réquichot, Dado and Bettencourt, a group of singular painters who are unclassifiable and simply essential. Included in the donation from Daniel Cordier to the Georges Pompidou - Beaubourg Museum public collections were two canvases by Michel Lablais.
In the wake of his relationship with Daniel Cordier, Lablais created a network among artists of the times notably Victor Brauner, Émile Gilioli, Bernard Réquichot, Dado, François Lunven et Pierre Bettencourt. His regular circle included Léonor Fini, Fred Deux, Wols as well as Iris Clerc. It is easy to imagine the witty coterie they created. Literary friendships added Bernard Noël, Andrée Chédid, Gilles Lipovesky, Michel Dupert et Michel Tournier. An avid reader, Lablais declared he was only slightly more attracted to Marcel Proust’s work than George Simenon’s. He took great pleasure in reading historical biographies and found with Saint Simon a sense of detail that sketched out the whole. The same could be said of Lablais’s work.
Collected by great admirers, this painter’s works are rare and singular. They are nonetheless essential, remaining outside schools and manifestos.